Il y a des rencontres que l’on espère et les rencontres que l’on provoque.
Ma rencontre avec Alain Schank alias Snach-Ka fait partie de celles qu’on espère, qu’on provoque et qui se révèlent être évidentes.
Evident comme répondre OUI quand il me propose en ce début de printemps de venir le rencontrer chez lui en Belgique dans son immense atelier industriel en pleine friche à quelques kilomètres de Liège.
Liège ? S’il m’avait dit Mandelieu-La-Napoule ou Mars, ça n’aurait rien changé. Snach-Ka et moi, l’histoire avait déjà commencé.
Six heures de covoiturage plus tard et je passe trois jours à échanger beaucoup beaucoup sur l’art et la vie, à l’écouter s’interroger constamment sur ce qui l’anime et à découvrir une partie des œuvres protéiformes et saisissantes qu’il a réalisées pendant une vingtaine d’années en abstraction. Ces expérimentations picturales intenses avec de grandes séries d’abstraction sur la thématique du geste, de la matière ou encore du hasard lui ont valu d’être exposé internationalement et d’être présent dans plusieurs galeries.
Cette période s’achèvera en 2018, alors qu’il a le sentiment d’avoir tout éprouvé dans son travail abstrait et qu’il se sent manipulé par le système du marché de l’art. A cette période complexe s’ajoute des évènements douloureux, il perd des êtres chers. Il va passer trois années sans peindre.
En 2021, l’envie revient et avec elle son alias Snach-Ka qui l’accompagnait en secret dans les marges de son travail depuis des années. Il est figuratif, libre, décomplexé, désintéressé et ne respecte rien d’autre que l’instant. L’introspection d’Alain Schank par Snach-Ka est boulimique. Ses personnages déjantés nous hurlent leur déglingue, à la limite de l’agression. Les mots, dans toutes les langues, et les collages font leur apparition. Le combat a recommencé. Mais cette fois ça va être trash et il va se servir de la visibilité sans filtre des réseaux sociaux pour le faire savoir.
En moins de deux ans 16,5K followers suivent ses réels énervés sur Instagram @Snach-Ka, Snach-Ka produit et s’expose en accéléré comme un témoin de son temps.
Il faut que ça claque mais sans recherche d’esthétique. Les couleurs sont fortes, vives, primaires, prises au hasard. La peinture est crachée sur la toile et les pinceaux souvent lancés en mode action painting. Les tracés sont appuyés créant des contrastes saisissants d’impulsivité et d’immédiateté. En cela, il se reconnait volontiers de l’expressionisme abstrait américain mais aussi dans le mouvement artistique CoBrA né en réaction aux querelles entre abstraction et figuration. Il renoue avec une matière primitive essentielle, s’y plonge totalement ignorant toute codification esthétique déterminant les notions de beauté et de laideur. Snach-Ka ne peint pas pour décorer les murs, il peint pour se confronter et être vu.
Il libère ses frustrations pour que nous interrogions les nôtres.
Le combat n’est pas toujours gagné d’avance, il détruit énormément de toiles essentiellement des grands formats et des dessins. Chez lui c’est tout ou rien.
Seul l’acte de peindre semble compter.
Ses inspirations ? Des tonnes. Mais beaucoup, les arts premiers, Duchamps et ses Ready Made qui collent à la réalité, Cy Twombly, pour l’énergie qui émane de sa peinture et qui ne la rend pas accessible à n’importe qui. Willem De Kooning, Antoni Tàpies ou encore Asger Jones dans la place essentielle qu’il accorde à l’acte de peindre ainsi que pour ses suggestions de figures humaines ou de bestiaires imaginaires. La pop culture, le street art et Basquiat tout autant que Keith Haring.
Le chaos est ambiant. Et je commence à respirer sous l’eau.
Je suis déstabilisée mais pas ko. J’en veux encore.
Snach-Ka c’est un peu comme une boisson énergisante. Sans le sucre.
A défaut de pouvoir faire rentrer des toiles dans la voiture de mon chauffeur du retour, j’ai eu la chance pour ne pas dire la joie intense, de repartir avec des acryliques sur papier. Une première série est disponible sur le site SHOP. C’est exceptionnel. L’artiste n’est en vente qu’en galerie.
Je remercie Snach-Ka pour son accueil, les boulets à la liégeoise, frites, à Theux à deux, sa disponibilité, sa générosité dans l’échange et le partage de son exceptionnel travail. Et pour CA…
There are encounters that one hopes for and encounters that one provokes.
My meeting with Alain Schank alias Snach-Ka is one of those that you hope for, that you provoke and that turn out to be obvious.
It was as obvious as saying “yes” when he asked me to come and meet him at his home in Belgium, in his huge industrial workshop in the middle of a wasteland a few kilometres from Liège.
Liège? If he had told me Mandelieu-La-Napoule or Mars, it wouldn’t have made any difference. Snach-Ka and I, the story had already started.
Six hours of carpooling later and I spend three days talking a lot about art and life, listening to him constantly questioning what drives him and discovering some of the protean and striking works that he has produced over the past twenty years in abstraction. These intense pictorial experiments with large series of abstractions on the theme of gesture, matter and chance have earned him international exposure and a presence in several galleries.
This period will come to an end in 2018, when he feels he has experienced everything in his abstract work and feels manipulated by the art market system. To this complex period is added painful events, he loses loved ones. He spent three years without painting.
In 2021, the urge returns and with it his alias Snach-Ka, which had been secretly accompanying him in the margins of his work for years. He is figurative, free, uninhibited, disinterested and respects nothing but the moment. Snach-Ka’s introspection of Alain Schank is bulimic. His crazy characters scream their madness at us, bordering on aggression. Words, in all languages, and collages make their appearance. The fight has started again. But this time it’s going to be trashy and he’s going to use the unfiltered visibility of social networks to make it known.
In less than two years 16.5K followers follow his real-life antics on Instagram @Snach-Ka, Snach-Ka produces and exposes himself in a hurry like a witness of his time.
It has to be loud but without any aesthetic research. The colours are strong, vivid, primary, taken at random. The paint is spit on the canvas and the brushes are often thrown in action painting mode. The strokes are strong, creating striking contrasts of impulsiveness and immediacy. In this, he readily recognises himself in American abstract expressionism but also in the CoBrA artistic movement born in reaction to the quarrels between abstraction and figuration. He reconnects with an essential primitive material, immersing himself in it totally ignoring any aesthetic codification determining the notions of beauty and ugliness. Snach-Ka does not paint to decorate the walls, he paints to confront himself and to be seen.
He releases his frustrations so that we can question our own.
The battle is not always won in advance, he destroys a lot of canvases, mainly large ones.
With him it is all or nothing.
Only the act of painting seems to count.
His inspirations? Tons. But a lot, the primitive arts, Duchamps and his Ready Made which stick to reality, Cy Twombly, for the energy which emanates from his painting and which does not make it accessible to just anyone. Willem De Kooning, Antoni Tàpies or Asger Jones in the essential place he gives to the act of painting as well as for his suggestions of human figures or imaginary bestiaries. Pop culture, street art and Basquiat as well as Keith Haring.
The chaos is ambient. And I start to breathe underwater.
I am unsettled but not ko. I want more.
Snach-Ka is a bit like an energy drink. Without the sugar.
As I couldn’t fit any paintings into my driver’s car on the way back, I was lucky enough, not to say intensely happy, to leave with some acrylics on paper. A first series is available on the website. SHOP It is exceptional. The artist is only available in galleries.
I would like to thank Snach-Ka for his welcome, the Chips, his availability, his generosity in exchanging and sharing his exceptional work.